La fabrique métropolitaine des gares "du quotidien" - École des Ponts ParisTech Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2016

La fabrique métropolitaine des gares "du quotidien"

Elise Avide

Résumé

Depuis la fin des années 2000, le terme de « quotidien » se substitue dans les discours à celui de « banlieue » pour désigner les différentes composantes sociotechniques du réseau de transport existant en Île-de-France. En 2013, le Contrat de Plan État–Région comme le projet stratégique du groupe SNCF « Excellence 2020 » consacrent ainsi la « priorité des priorités » aux « transports du quotidien ». Au-delà d’un simple glissement sémantique, on assisterait là à l’émergence d’une nouvelle catégorie de l’Aménagement qui ne serait pas sans effet sur la fabrique urbaine. C’est sur cette idée que nous avons construit la démarche de recherche de notre thèse. Pourquoi, à un moment, les acteurs dans les arènes professionnelles de l’aménagement et des transports se réfèrent-ils au « quotidien » et qu’est-ce que cela produit ? Cette question est explorée au prisme des gares existantes du réseau Transilien de la région Île-de-France. Focaliser l’enquête sur ces objets circonscrits permet, dans la plus grande tradition de la sociologie urbaine (cf. Joseph, 1999), de saisir dans leur interdépendance les divers ordres de phénomènes qui s’imbriquent dans l’émergence du « quotidien » comme nouvelle catégorie de l’Aménagement. De plus, ces gares suscitent elles-mêmes un nouvel engouement. Elles cristallisent les objectifs d’urbanisation dans le Schéma Directeur de la région Île-de-France et dans la loi du Grand Paris, et font l’objet d’un plan d’investissements assez inédit dans le cadre du contrat que l’autorité organisatrice des transports franciliens négocie avec l’opérateur ferroviaire historique. Au travers des gares « du quotidien », nous cherchons donc à voir comment une catégorie émerge, comment elle se remplit de significations au gré d’interactions entre acteurs, et ce qu’elle rend possible ou au contraire interdit. Notre recherche se situe ainsi à la croisée des questionnements sur les fonctions de l’imaginaire dans la fabrique urbaine (cf. Roseau, 2012 ; Picon, 2014) et sur le pouvoir qu’ont les catégories à produire certaines réalités (cf. Tissot, 2007). Pour mener cette recherche, nous nous appuyons sur un corpus rassemblant différentes formes de discours d’acteurs, construit sur la base de trois matériaux principaux. Le premier est constitué d’articles issus de revues professionnelles, ferroviaires et urbaines. Deux d’entre elles (La Revue Générale des Chemins de Fer et Urbanisme) ont été explorées de manière systématique depuis les années 1960, afin d’identifier les glissements et ruptures dans les énoncés sur les gares, sur les réseaux de proximité et sur la banlieue. Le second réunit le verbatim accumulé au cours d’entretiens semi-directifs réalisés auprès de différents acteurs qui participent à la fabrique des gares « du quotidien », dans les arènes du transport (groupe SNCF, Société du Grand Paris, Syndicat des Transports d’Île-de-France) et de l’aménagement (collectivités territoriales, agences d’urbanisme). Enfin, une étude de cas sur les neuf gares concernées par le prolongement du RER E (Éole) à l’Ouest a été menée. Celle-ci a été nourrie par des entretiens semi-directifs auprès des différents acteurs parties prenantes du projet ainsi qu’une observation participante au sein de groupes de travail. Contrairement à d’autres disciplines des sciences humaines, comprendre comment une catégorie se construit autour d’un terme n’est pas une démarche traditionnelle en Aménagement. Nous défendons ici l’idée qu’elle peut pourtant être utile à des praticiens, dans la mesure où il s’agit aussi d’une catégorie de l’action, et qu’en cela elle pose la base de diagnostics spécifiques et dessine un programme de transformations urbaines. Notre recherche s’adresse ainsi largement aux professionnels de l’urbanisme et des transports soucieux de s’informer sur la portée et les effets des instruments qu’ils mobilisent. Pour démontrer cela, nous proposons d’explorer dans cette communication deux pans particuliers de la réflexion sur l’aménagement des gares « du quotidien » : celui de l’intermodalité et celui du développement urbain des quartiers de gare. Ces deux thèmes ont été privilégiés dans la mesure où ils constituent des enjeux considérés comme primordiaux par les acteurs de la fabrique de ces gares et parce qu’ils présentent une évidente dimension spatiale. De plus, ils permettent d’aborder deux grands domaines d’investigation à la charnière desquels se construit la pensée sur les gares : celui de la rationalité technique des acteurs du transport et celui des discours aménagistes sur la banlieue. L’analyse propose de voir comment l’avènement de cette catégorie du « quotidien » bouscule la manière de concevoir les aménagements intermodaux d’une part et les programmes urbains des quartiers de gare d’autre part. À partir de ces deux exemples, elle cherche in fine à nourrir des réflexions plus théoriques sur la question des imaginaires et sur la manière dont ils agissent concrètement sur la fabrique urbaine. Cette recherche s’inscrit dans le cadre d’une thèse de doctorat en Aménagement et Urbanisme, effectuée au sein du Laboratoire Techniques, Territoires et Sociétés (LATTS). Elle fait par ailleurs l’objet d’un contrat de collaboration de recherche entre l’École nationale des ponts et chaussées et la Direction des Gares Île-de-France de la SNCF.
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01484395 , version 1 (07-03-2017)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01484395 , version 1

Citer

Elise Avide. La fabrique métropolitaine des gares "du quotidien": Imaginaires et fonctions d'une catégorie émergente de l'Aménagement. L'innovation dans la recherche architecturale et urbaine, journée doctorale, Ecole d'Architecture de la ville & des Territoires; Ecole des Ponts ParisTech, Nov 2016, Champs-sur-Marne, France. ⟨hal-01484395⟩
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